DURAS (M.). Un barrage contre le Pacifique. Paris, Gallimard, NRF, 1950, in-12, broché, couverture imprimée d'éditeur.
ÉDITION ORIGINALE.
Chez Duras, l'œuvre n'a de cesse de se confondre avec la vie. L'autobiographie se frotte fréquemment à la fiction. Son quatrième roman, Un barrage contre le Pacifique (Gallimard, 1950), ne déroge pas à cette règle puisqu'il a pour cadre l'Indochine française des années 1930, où Marguerite a vécu durant son adolescence. L'auteur nous entraîne sur les pas d'une institutrice veuve, flanquée de ses deux enfants, Joseph et Suzanne, en proie à la solitude et à l'ennui. En butte à l'administration coloniale corrompue, l'héroïne a investi toutes ses économies dans l'achat d'une concession mais la plantation de riz périclite en raison des inondations. Un barrage de fortune (« contre le Pacifique », dit Duras, même s'il ne s'agit que de la mer de Chine) n'y change rien ; il finit par céder.
Duras signe le roman d'une entreprise vouée à l'échec. Un combat acharné contre la nature, doublé d'un texte initiatique où émergent quelques figures de femmes qui peupleront ses fictions futures. C'est aussi le récit d'une relation sentimentale annonçant L'Amant, entre un planteur fortuné (le vil Monsieur Jo) et une jeune fille de 17 ans. La fascination qu'exerce ce livre tient à la vision noire du colonialisme, très éloignée de l'image d'Épinal qu'il véhicule d'ordinaire. La cellule familiale est également dépeinte sous un angle très sombre. Trafic d'opium et magouilles en tout genre sont monnaie courante et permettent d'assurer la survie des « petits Blancs » condamnés à la misère et à l'endettement.
Il s'agit d'un titre charnière : le dernier d'une série de romans à la facture plutôt classique (qui n'est pas sans rappeler Conrad) ; le premier livre d'un style nouveau où la narration et la description s'effacent peu à peu au profit de dialogues restituant un monde intermédiaire entre le dit et le non-dit, cet « indicible » qui caractérisera dorénavant l'art de Duras.
Le roman a été porté à l'écran à deux reprises : en 1958 par René Clément, avec Anthony Perkins et Silvana Mangano au générique, et plus récemment, en 2008, avec Isabelle Huppert dans le rôle principal. Ces deux adaptations, à cinquante ans d'écart, témoignent de l'intérêt toujours vif que suscite Un barrage contre le Pacifique et, plus largement, l'œuvre de Duras, voix majeure de la littérature contemporaine.
L'un des 38 premiers exemplaires sur vélin pur fil Lafuma-Navarre.
Il est préservé dans une chemise-étui à dos de box rouge de Devauchelle.
Dimensions : 189 x 117 mm.
Aucune marque de provenance.
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