PERRAULT (Ch.). Histoires ou contes du tems passé. Avec des moralités. Nouvelle édition augmentée d'une nouvelle, à la fin. À la Haye, Paris, Coustellier, 1742, petit in-8°, maroquin rouge à grains longs, filet doré autour des plats, dos lisse, tranches dorées (reliure du XVIIIe siècle).
Charles Perrault, zélateur des Modernes et « inventeur » des contes de fées.
Proche collaborateur de Colbert, Charles Perrault (1628-1703) fut chargé de la politique artistique et littéraire de Louis XIV. Élu à l'Académie française en 1671, c'est là qu'il donne, 16 ans plus tard, lecture de son poème, Le Siècle de Louis XIV, dans lequel il vante la supériorité des auteurs contemporains sur les Anciens. Le texte provoque l'ire de Boileau et constitue le point de départ de ce que l'on nomme la Querelle des Anciens et des Modernes. La mort de Colbert le contraint de se retirer de la vie publique ; il se consacre alors aux lettres et à l'éducation de ses enfants. C'est pour eux, semble-t-il, qu'il recueille et met en forme des contes merveilleux issus du patrimoine oral français. Parus pour la première fois en 1697, ses Contes du tems passé, qui furent longtemps attribués à son fils, créent un nouveau genre littéraire destiné aux enfants et promis à une belle postérité : les contes de fée. Fidèle à ses idées, Perrault y met en avant les traditions nationales contre celles héritées de l'Antiquité. Mais il tient avant tout à y faire œuvre de pédagogue : chaque conte met en scène des thèmes dont l'enjeu est l'éducation de l'enfant et son initiation aux règles de la vie en société. En outre, chacun s'achève sur l'énoncé d'une ou plusieurs moralités, à la manière des Fables que La Fontaine publia à partir de 1668.
Une édition qui bouleversa l'ordre et l'iconographie des Contes de Perrault, tels qu'ils avaient été fixés dès leur origine.
En effet, dès la version manuscrite la plus ancienne connue (datée 1695, elle est conservée aujourd'hui à la Pierpont Librairy, à New York), le recueil, qui contient alors 5 contes, est illustré à la gouache d'un frontispice et chaque conte d'un bandeau. Ce cycle iconographique originel, Antoine Clouzier le reprend fidèlement dans ses burins pour la première édition publiée chez Barbin en 1697.
L'édition de 1742 apporte plusieurs changements. Elle bouleverse l'ordre des contes : « Le Petit Chaperon rouge » ouvre désormais le recueil et acquiert ainsi une place majeure qui était précédemment celle des « Fées ». Une neuvième pièce, « L'Adroite Princesse ou les avantures de Finette », due en fait à Mlle Lhéritier, nièce de Charles Perrault, prend place à la fin du recueil. Mais surtout, cette édition fait date par les illustrations de Jacques de Sève que grave le Hollandais Simon Fokke. Dans ses dessins, de Sève, dont c'est l'un des premiers travaux connus et qui fut actif jusque vers 1788, n'hésite pas à s'écarter résolument du modèle initial. Il fait le choix de représentations plus violentes, telle la dévoration du petit chaperon rouge, ou qui trahissent la lettre du texte pour accroître la force de l'image, comme pour la mort de Barbe-bleue. Privilégiant l'expressivité, ses illustrations gagnent en modernité. Mettant l'accent sur le drame propre à chaque conte, elles en accroissent l'effet et la portée éducative.
Les figures de Jacques de Sève seront réutilisées pour l'édition de 1781, chez Lamy.
Exemplaire à belles marges, bien conservé.
L'emploi d'un maroquin à grains longs et le dos lisse de la reliure semblent indiquer pour celle-ci un travail du dernier quart du XVIIIe siècle.
Dimensions : 152 x 92 mm.
Provenance : Henri Beraldi (Cat. II, 29 mai-1er juin 1934, n° 198 « reliure de la fin du XVIIIe siècle »).
Tchemerzine, IX, 181 ; Rochebilière, Bibliographie des éditions originales, 539 « Il est à peu près impossible de se procurer les Contes de Perrault en bel état, presque tous les exemplaires ayant passé entre les mains des enfants » ; Cohen, II, 788-789 ; Brunet, IV, 508 ; Gumuchian, Les livres de l'enfance, 4410 « Célèbre et rare édition, très recherchée... » ; Portalis (R.), Les Dessinateurs d'illustrations..., I, Morgand, 1877, pp. 619-622 et 683 ; [...], Il était une fois... les contes, BNF, 2001, pp. 63, 75-107 et 155-165 ; Glénisson (J.)-Le Men (S.), Le livre d'enfance et de jeunesse en France, 1994, pp. 21-23.
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